DENC!-STUDIO

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Trois piliers de l’habitat inclusif contribuent à la revitalisation de la Porte de Bruges

 

Dans le cadre du développement urbain et de la revalorisation d’un quartier, de nouveaux projets de logements peuvent souvent faire office de catalyseurs. La Porte de Bruges à Gand est un bon exemple d’un quartier très vivant mais longtemps négligé, pour lequel toute initiative était la bienvenue.

Cela n’avait pas échappé à l’entreprise gantoise d’urbanisme SOGENT. Sous la direction de celui qui était alors son président, Tom Balthazar, ce bureau a lancé en 2013 une mise au concours. Le projet proposé portait sur trois immeubles en décrépitude qui dominent et délimitent un bloc d’habitations. Deux d’entre eux se situent sur le périphérique intérieur de Gand, appelé Rooigemlaan. Le troisième immeuble est à la rencontre des deux rues transversales, la Gaaipersstraat et la Boomstraat.  

Il est important de savoir que ce bloc d’habitations, qui date de 1928, avait vu le jour dans le cadre d’un projet de construction de logements sociaux. Un triangle de petites maisons mitoyennes à l’impact écologique faible, avec à chaque angle un immeuble d’appartements un peu plus élevé. Vu le contexte historique, SOGENT voulait que le projet réalisé présente une valeur ajoutée sociale. De préférence sous forme de rénovation, avec une nouvelle construction seulement si cela était vraiment nécessaire. Plus tard, SOGENT a décidé de vendre ce projet, qui a ainsi atterri dans les mains d’un petit promoteur immobilier prêt à s’y engager totalement. L’acquéreur a également placé sa confiance dans DENC!-STUDIO, le lauréat du concours. En guise de valeur ajoutée sociale, il souhaitait aménager un habitat inclusif en construisant des logements pour des personnes souffrant d’autisme. En effet, les listes d’attente pour des logements adaptés à leur condition sont longues. Son projet devait remédier à ce manque aigu.

Le critère de l’empreinte écologique réduite – certainement pour deux des 3 immeubles – avait déjà causé bien des maux de tête durant la phase de conceptualisation. En isolant depuis l’extérieur, on devait sacrifier une partie du trottoir, et depuis l’intérieur, c’est l’habitation elle-même, déjà peu spacieuse, qui allait devoir en pâtir. Pourtant, DENC!-STUDIO a décidé d’examiner très attentivement les deux options. Tout le monde s’est accordé pour conclure que dans le premier cas, non seulement on perdait beaucoup d’espace pour le sentier, mais en plus, l’architecture d’origine, avec ses belles briques, allait entièrement disparaître. Dans le second cas, la surface nette qui restait après l’isolation serait extrêmement petite, plus petite même que le minimum généralement autorisé par la société de logement social. Ce n’était pas le cas ici, mais cette idée a fourni une motivation supplémentaire pour rejeter la deuxième option.

En résumé, après cette étude, il était clair qu’on allait devoir opter pour une nouvelle construction. Une décision difficile, vu l’importance visuelle que revêtaient ces bâtiments dans le quartier. DENC!-STUDIO s’est donc efforcé de construire des logements aussi proches que possible de l’original. L’empreinte écologique et la hauteur sont restées les mêmes, conservant ainsi la fonction angulaire des bâtiments. Seule leur structure était plus moderne, avec toutefois un petit clin d’œil au passé. Là où DENC!-STUDIO voulait aussi apporter un changement, c’est dans le confort d’habitation. Les logements sociaux de ce genre ont souvent peu d’espace à l’extérieur, en particulier ceux qui terminent une rangée. Il est également fréquent de manquer de lumière, ce qui rend ces habitations moins populaires sur le marché immobilier. D’un autre côté, la demande pour des logements de qualité en ville est grande, en particulier parmi les personnes souffrant d’autisme.

DENC!-STUDIO s’est penché sérieusement sur cette question afin de créer un espace adapté. Mais il ne fallait pas non plus le rendre trop exclusif, car dans le cadre de l’habitat inclusif, l’idée est précisément d’obtenir un mélange harmonieux. Les logements restent donc simples, une caractéristique qui s’est imposée d’elle-même pour répondre aux exigences d’une petite empreinte écologique. On a cependant veillé à aménager, dans l’un des trois immeubles, un espace destiné à un prestataire de soins pour les personnes atteintes d’autisme. En fin de compte, DENC!-STUDIO a choisi de construire un logement par étage dans les deux plus petites maisons en coin et deux par étage dans le bâtiment plus grand. L’avantage des nouvelles constructions, c’est la liberté que l’on a d’en définir soi-même l’accès et les voies de passage. Au rez-de-chaussée, l’entrée a donc été décentrée, permettant de créer un plus grand espace d’habitation. Les bâtiments sont caractérisés par une logique simple et claire, avec seulement une petite différence au niveau du rez-de-chaussée due à la fonction d’accès. Pour le reste, tout est exactement identique sur les 3 étages, les plans tiennent ainsi sur un petit bout de papier – un critère essentiel pour DENC!-STUDIO.

En suivant l’entrée au rez-de-chaussée, on arrive à un porche avec un espace pour les vélos. On pénètre ensuite dans la « grande » salle de séjour composée d’une cuisine, d’une salle à manger et d’un salon, et dans le coude inversé qui se trouve à l’arrière, un noyau d’escalier permet l’accès à l’étage supérieur. C’est là que se situent la chambre à coucher, la salle de bains, le grenier et les toilettes. Pour un plus grand confort, les habitations ont été dotées d’une petite terrasse à l’extérieur – le seul emplacement possible du fait de l’espace restreint à l’intérieur. Les terrasses sont tournées vers l’avant là où les habitations sont entourées de murs, et vers l’arrière là où le bâtiment surplombe les maisons voisines. On retrouve une disposition très similaire dans le plus petit bâtiment situé sur la Rooigemlaan. Dans la plus grande construction, on a choisi de doter chaque étage de deux studios. C’est le seul bâtiment qui reçoit de la lumière à l’arrière et où le passage est organisé le long d’une gaine réservée à l’ascenseur et à l’escalier. Chaque studio possède une salle de bains séparée, mais pour dormir et manger (kitchenette), on se contente d’une pièce.

La fonction de délimitation des trois tours est accentuée par le choix des matériaux, plus précisément, par l’architecture en briques. DENC!-STUDIO a mis un point d’honneur à définir cet élément dans le respect du passé. La ligne d’époque que l’on retrouve notamment dans les divers appareillages et la fenêtre aveugle donne un aspect plaisant à ces constructions, qui se démarquent ainsi dans le paysage urbain. Ces composantes alternent avec des éléments plus modernes tels que l’ouverture des fenêtres. Pour DENC!-STUDIO, il était important de réaliser la même structure en briques à l’arrière de la partie plus haute afin de donner aux bâtiments un aspect homogène sur le plan vertical, et bien aligné avec les maisons voisines. Avec ces trois
piliers en briques, le paysage urbain obtient la plus-value architecturale que promettait ce projet.

Les murs porteurs à l’extérieur des bâtiments ont été érigés à l’aide d’un squelette en bois. Cette technique ne fait pas qu’accélérer le processus de construction – ce qui n’est pas sans importance pour un lieu très fréquenté en ville – mais elle permet également de pourvoir les maisons d’une bonne isolation thermique sans devoir bâtir des murs épais qui prendraient trop de place. Pour satisfaire aux exigences de sécurité incendie et optimiser l’acoustique dans les immeubles, on a tout de même décidé de séparer les étages par des planchers en béton coffré, qui procure aux habitations un aspect particulièrement moderne et industriel. Une telle structure hybride, qui combine le béton et le squelette en bois, est plutôt rare mais témoigne de la bonne collaboration entre l’architecte et le promoteur immobilier. Les noyaux fonctionnels permettent de concentrer les parties techniques dans une petite surface et de réduire les frais de conduites et de câblage. Quant aux sols, ils sont en résine synthétique blanche qui, avec le blanc des murs et les ouvertures de fenêtres dans les deux murs, renforcent l’aspect lumineux et la spatialité des habitations.  

Avec ce projet, DENC!-STUDIO a su à la fois créer une qualité d’habitation optimale dans un espace réduit, répondre à une demande croissante de logements inclusifs et insuffler une nouvelle vie à un quartier tout en conservant son lien avec le passé. Un projet socialement durable comme il en faudrait davantage.

Texte: Sam Paret
Photos: Nick Cannaerts & DENC!-STUDIO

 

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