AST77

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Vivre comme un empereur romain à Tirlemont

 

Qui dit « vivre dans un centre-ville », pense peut-être encore au bruit et au manque d’espace. Une idée qui est cependant bien loin de la réalité. Dans ce numéro de PLAN Magazine, vous constaterez que de plus en plus de maître d’ouvrage et d’architectes transforment nos (centre-)villes en des espaces de logement qualitatifs et reposants où il fait bon vivre. Ainsi, l’architecture présente sa réponse à la pression d’une population grandissante et à la demande de durabilité. Le projet « Hof van Rome » (« La Cour de Rome »), au cœur de la ville de Tirlemont, est un autre bel exemple des efforts de nos architectes dans ce sens. Au centre de Tirlemont, nous nous trouvons devant un nouveau projet de logement marquant, réalisé par le bureau d’architectes local AST77: la Cour de Rome. Entrevue avec Peter Van Impe. « Nous étions installés dans la ville depuis cinq ans quand nous avons reçu la demande de démolir trois maisons dans ce quartier et de les remplacer par un nouveau projet », explique Peter Van Impe. « L’ensemble devait compter deux espaces commerciaux au rez-de-chaussée, huit appartements et un penthouse. Vu que le site se trouve en plein quartier historique et qu’il fallait prévoir un espace souterrain pour le parking et les locaux techniques, une fouille archéologique approfondie a précédé les travaux. » Au cours de cette fouille, les architectes découvrirent les fondations de quelques maisons du 14ième et 15ième siècles. Ces découvertes, dans le cadre d’une des villes belges les plus anciennes de notre pays avec ses 1001 de statut de « ville », ont inspiré les architectes à baptiser le projet « Hof van Rome », la Cour de Rome.

 

Vision

Le programme du maître d’ouvrage était très ouvert: »vivre et travailler en ville de façon qualitative ». « C’était une grande liberté », ajoute Peter Van Impe, « mais en même temps, on se trouvait devant la problématique des villes comme Tirlemont: la qualité. Avec ce projet, nous voulions valoriser le potentiel du centre-ville ainsi que le bâtiment et le patrimoine en intégrant la qualité tout en pensant à l’espace public. » Dans cette optique, le dialogue avec le public était très important pour les architectes. Ainsi, des fenêtres à hauteur de plafond et des terrasses sur les coins contribuent à l’ouverture du bâtiment. Chaque appartement dispose d’un espace extérieur sous forme de balcon ou de loggia. On se rend vers les appartements via un ascenseur externe ou un escalier, donnant tous deux sur des plateformes avec vue sur l’espace intérieur. Plus de couloir ou de cage d’escalier sinistre: à la Cour de Rome, la circulation est un endroit agréable et ouvert, propice aux rencontres. Dans cette structure ouverte, où l’acier est omniprésent, chaque niveau a un endroit de rencontre permettant aux gens de s’asseoir. Chaque porte donne accès à un lieu que les habitants peuvent s’approprier en plaçant une banquette, une plante, une table…

 

Présentation extérieure

Le but était évidemment que ce bâtiment s’intègre dans le contexte de la rue commerciale adjacente, la Hennestraat étant l’une des rues commerciales les plus importantes de Tirlemont. Le but était également que ce projet soit en harmonie avec le rythme des maisons entourant le site. « Une étape importante était l’étude avec la ville de capter le rythme des parcelles et de ne pas créer un bloc. Pour la finition de la façade, nous avons recherché la référence aux bâtiments historiques peints en blanc du centre-ville de Tirlemont. Nous voulions que la façade invite à approcher le regard. Un effet que nous avons atteint en changeant le motif des briques à chaque mètre. Ainsi, on retrouve un motif à la verticale, à l’horizontale, etc. Plusieurs motifs qui donnent du rythme à la façade. »

 

Penthouse

L’intérieur du penthouse, en meubles fixes, est également le travail des architectes. Dans ce penthouse, rien ne dépasse, ce qui fait que l’ensemble est un endroit reposant que l’habitant peut habiller comme il le souhaite. « Ce qui était original, c’était que nous devions concevoir l’intérieur sans connaître l’habitant. L’habitant actuel a d’ailleurs ajouté ses propres meubles. » Un intérieur dont l’effet est l’opposé de celui de la façade. La façade est quelque chose d’abstrait et de distant qui ne révèle ses finesses que quand on s’en approche, alors que pour l’intérieur, les architectes ont choisi des matériaux chaleureux et tactiles, donnant un ensemble doux et accessible. « Ce qui est important ici, c’est la richesse des matériaux. Ainsi, le parquet est en chêne et toutes les armoires sont en chêne contreplaqué (coloré). Le bois dans les tons raffinés noir, brun clair et bleu, est égayé par des accents dorés. Par les justes proportions, l’ensemble est chaleureux et reposant. »

 

Espace

Le penthouse se trouve sous une toiture inclinée, reliée aux voisins. Avec une hauteur de plafond atteignant plus de 6m. Une luxuriance en espace, dont le potentiel a été pleinement utilisé par l’architecte. Le salon, endroit intime, se trouve sous un plafond plus bas alors que la salle à manger est placée sous un plafond haut. Avec ses trois terrasses, le penthouse est inondé de lumière naturelle et offre des vues sur toute la ville. De plus, il est entouré de toitures vertes. Les habitants ne se retrouvent donc pas au-dessus de toits monotones et la qualité de l’habitation est maintenue. Les décorations de fenêtre donnent l’ambiance et la temporisation des espaces dans leurs fonctions diverses.

 

Qualité intégrale

« Nous n’aimons pas trop ce mot, ‘durabilité' », rit Peter Van Impe. Chez AST77, on parle plutôt de « qualité intégrale ». La Cour de Rome dispose de toutes les techniques aidant à réduire l’empreinte écologique et est fortement isolée (16 cm d’isolation + pierre de façade), mais cela s’intègre dans le contexte total, plutôt que de servir à cocher le mot ‘durabilité’. « Ce que beaucoup de gens entendent sous cette expression n’a en fait rien avoir avec la durabilité. Ici, nous voulons surtout savoir ce que vous souhaitez. Chacun a sa propre personnalité et ses propres souhaits. Si on tient compte de la qualité intégrale, le résultat est juste. Prenons ce penthouse bien isolé en centre-ville: il est beaucoup plus qualitatif qu’une habitation passive à la campagne. »

 

A propos d’AST77

AST77 a été fondé par Peter Van Impe il y a dix ans. L’équipe se compose aujourd’hui de 6 collaborateurs et, en plus de ses projets, est très impliquée dans le développement de sa propre ville. « Nous tenons à assumer notre responsabilité pour notre ville. Ainsi, nous avons créé ParkLife dans le cadre d’une recherche conceptuelle. Il s’agit d’un évènement estival dans le parc de la ville, au cours duquel nous entrons en dialogue avec les habitants à propos de la ville écologique, sociologique, créative et physique. » Le fil rouge dans les créations du bureau, c’est la qualité intégrale. Peter Van Impe parle également d’un « costume sur mesure flexible ». « Nous ne faisons pas dans le « prêt-à-porter », mais travaillons à la mesure de l’endroit, du maître d’ouvrage, du projet. Ce que nous ne voulons pas, c’est créer une robe de mariage. Cela ne se porte qu’une fois. Nous travaillons donc sur mesure, mais pas pour une seule personne. Si nous avions fait cela pour le penthouse, le projet n’aurait jamais connu de succès. Ce que nous réalisons, ce sont des bases permettant à tout un chacun d’y voir son histoire. C’est exactement ce qui s’est passé dans le cas du penthouse: son habitant a eu un véritable coup de foudre. » Peter Van Impe se rendra à la Biennale de Venise avec Atelier X pour y travailler au projet « Bringing Earth to a Sinking Island » à propos de la vie en ville, dans sa ville.

 

Texte: Kim Schoukens
Photos: Steven Massart & Lander Loeckx

 

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