BIVWAK architecture studio

BIVWAK architecture studio

Dans la région située près de Redu et Libin se trouve un village classé. Les maisons y sont en pierre et celle-ci, près du centre du village, n’échappe pas à la règle. Pour que les nouvelles annexes créées ne s’additionnent pas à la bâtisse existante mais fusionnent avec elle et avec la nature, Julien Déom, architecte et fondateur du studio Bivwak, utilise la magie de l’effet miroir.

Au départ, il s’agissait pour Julien Déom de transformer cette bâtisse en deux logements: une habitation classique et un locatif sous forme de petit gîte. Mais la maison a été laissée à l’abandon et porte les traces de nombreux ajouts et extensions ayant rendu la bâtisse assez labyrinthique au fil des ans. Il s’agit donc, dans un premier temps, de nettoyer le tout pour réinventer et réarticuler les espaces. Si la demande initiale reste assez simple, il faut y répondre au cœur d’un village classé et pour une bâtisse véritablement accrochée à la roche offrant dès lors un accès assez difficile sur sa partie arrière et ne permettant pas d’envisager des terrassements en vue d’une augmentation des volumes. Or, Julien Déom veut redonner de la hauteur aux pièces de vie. Cette option impose la création de deux extensions: une première, aérienne, dédiée à la suite parentale et une seconde, encastrée dans la terre, pour accueillir le vestiaire et l’entrée du gîte. Pour contourner deux difficultés, celle de l’exiguïté du lieu et celle de son classement, le studio d’architecture décide deux choses: d’une part monter le volume aérien sur des pilotis posés de biais afin de faire écho au forestier et de s’y intégrer en douceur et d’autre part d’utiliser un matériau déjà mis en œuvre dans les pays nordiques, les panneaux d’Alucobond® Reflect. Il s’agit de panneaux composites recouverts d’une fine pellicule miroir. On a donc affaire à un matériau produisant l’effet d’un miroir, mais bien moins lourd et pas plus onéreux qu’un autre type panneau.

Le matériau utilisé pour les extensions est très impressionnant. En reflétant tout ce qui l’entoure, c’est-à-dire la forêt, la roche, le ciel, mais aussi le bâtiment existant, il crée une fusion entre tous les éléments et il parvient ainsi à mettre en évidence le bâtiment existant, d’éviter la lourdeur de l’addition des volumétries et de mieux intégrer les éléments neufs. Grâce à ce jeu de miroir, les annexes reflètent le contexte environnant, créent les effets visuels, des trompe-l’œil, des effets de lumière et finalement, cette paroi-miroir vient créer de l’émotion. Car la peau de ce bâtiment, en mouvement perpétuel, est véritablement vivante ! Ce matériau, aux jeux visuels riches et infinis, participe clairement à l’intégration du des annexes tout en laissant vivre la bâtisse existante. C’est, comme le dit Julien Déom, un matériau plein d’humilité qui disparaît au profit de tout ce qui l’entoure. Cela permet aux formes contemporaines de venir s’accrocher au bâtiment ancien avec une légèreté et une humilité infinie. Cela permet aussi de s’inscrire dans une vraie globalité où, partout, on se sent dans le même bâtiment et pas dans l’ancien ou le nouveau. Ce jeu de réflexions est tel qu’il a fallu créer un leurre de rapace pour effrayer les oiseaux et éviter qu’ils ne s’y trompent…

Dans le même esprit d’humilité, de respect et de mise en valeur du bâtiment d’origine, Julien Déom a à peine touché à la façade. Il a consenti à un seul petit percement calculé en fonction des percements existants puisqu’il a été fait dans les mêmes proportions que ceux-ci et s’est doté d’un encadrement métallique. Les châssis ont été choisis pour la discrétion de la finesse de leurs montants. Quant au nouveau chenal, produit en zinc moderne, il respecte, lui aussi, les proportions de l’ancien chenal en bois. Ensuite, le studio Bivwak a créé deux scénarios d’entrée pour répondre à la demande initiale. Ces scénarios ont mis en évidence le besoin d’augmenter le volume, la superficie pour connecter le bâtiment aux deux contextes énoncés dans la demande: l’habitation et le gîte. L’accès du rez-de-chaussée, par une extension encastrée en terre, est réservé au gîte tandis que, plus haut, l’accès donne sur le logement principal dont la seconde annexe abrite la suite parentale. Et si les deux éléments ajoutés, l’un encastré, l’autre sur pilotis, permettent une articulation du bâtiment autour des deux scénarios de vie, la mise en évidence des pierres impose une isolation des murs par l’intérieur et oblige à une nouvelle humilité: le coefficient de l’isolation des murs anciens n’atteindra pas celui des nouvelles parois. D’autant qu’il convient aussi de contenir le budget. On a donc une isolation de la partie ancienne assez classique et de performance modeste avec une couche de laine minérale n’empiétant pas trop sur le volume intérieur. Pour les annexes, l’isolation des murs répond aux exigences de la Région wallonne avec douze centimètres de polyuréthane. Les châssis sont quant à eux en double vitrage. L’isolation générale du bâtiment n’obli-geant pas à se tourner vers la super isolation d’un triple vitrage.

Si le matériau utilisé par le studio d’architecture permet d’ancrer les choses, de les intégrer avec subtilité dans leur environnement, il doit être utilisé de manière ponctuelle précise Julien Déom. Uniquement là où il crée des effets valorisants pour l’ensemble. Car créer un patrimoine, ce qui est, toujours selon l’auteur du projet, le propre de l’architecte, c’est innover de manière subtile, c’est créer un nouveau patrimoine tout aussi défendable et honorable que ce qui s’est construit avant nous. Il s’agit donc, là encore, d’humilité et de poésie. Une poésie que Julien Déom cherche à faire surgir de l’émotion générée par ses créations. Et, c’est certain, avec Mirror, Mirror, nom donné à cette éblouissante rénovation, l’émotion est au rendez-vous. Elle touche et émerveille tous ceux qui ont la chance d’admirer cette rénovation à l’esthétique minérale et végétale si particulière.

 

Texte: Chantal Ernst
Photos: François Brix
BIVWAK architecture studio
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