Atelier d’Architecture Jorge M. Slautsky

août 29, 2019

Atelier d’Architecture Jorge M. Slautsky

By Nick

STASSART 36: complexe avec 58 appartements et bureaux

Dans sa contribution à l’ouvrage » Architectuurna de hausse: Gouden Piramide 2010’ (uitgeverij 010), André van Stigt (Bureau van Stigt) affirme que le réaménagement des bâtiments existants doit poursuivre le mariage idéal entre fonction et culture. Gardant cela à l’esprit, il souligne qu’aux Pays-Bas (mais que c’est pareil en Belgique) il est trop facile de démolir de vieux bâtiments. Bien sûr, il évoque la sobriété de la culture pragmatique propre aux pays du nord de l’Europe occidentale. L’un des avantages les plus importants de la réutilisation est qu’il offre une solution partielle à la pénurie croissante de matières premières et de matériaux. Jorge Slautsky (Atelier d’Architecture Jorge M. Slautsky à Bruxelles) partage cette vision. Les projets Stassart 35 et 36 à Ixelles pour lesquels il était responsable de la conception en sont des exemples.

Le recyclage de la structure de l’ancien immeuble de bureaux fait également partie d’une philosophie plus large en matière de développement durable de la part du bureau de Slautsky. Le choix de maintenir la structure existante épargne au quartier beaucoup de transport de gravats avec le bruit et la poussière qui y sont associés. Le contexte urbain dense dans lequel s’inscrit le projet (proche de la Porte de Namur et de Matonge à Ixelles) et le caractère spécifique de la structure existante ont obligé l’architecte à trouver des solutions à diverses problématiques complexes.

Toison d’Or et environs

La structure existante du projet comprend 5 bâtiments, situés entre la Porte de Namur et la Place Stéphanie. Ces bâtiments font à leur tour partie d’un complexe plus vaste qui s’étend de l’avenue de la Toison d’Or à la chaussée d’Ixelles. Le sous-sol et le rez-de-chaussée présentent une spécificité particulière: le niveau du sol de l’avenue de la Toison d’Or se poursuit en raison du caractère montant du site en tant que sous-sol de la rue de Stassart. Tous les bâtiments sont reliés par la galerie marchande de la Toison d’Or, le complexe de cinéma UGC et le parking souterrain jusqu’au niveau -7. C’est seulement à partir du premier niveau que la séparation entre les différentes entités et les volumes devient claire: un bâtiment situé sur l’avenue de la Toison d’Or avec un permis de développement urbain distinct, un bâtiment au 29/31 de la chaussée d’Ixelles et un bâtiment au 33 de la rue de Stassart. Les deux bâtiments, le 35 de la rue de Stassart (STASSART 35, en construction) et le 36 (STASSART 36, en utilisation) complètent le complexe immobilier et font l’objet de cet article. STASSART 35 et STASSART 36 étaient utilisés comme immeubles de bureaux par la STIB, la société de transport intermunicipal à Bruxelles (transports en commun). Ils ont été conçus et construits par les mêmes parties à l’époque, ce qui a abouti à une élaboration esthétique, constructive et technique identique. Pour casser un peu l’uniformité, il a été demandé aux designers actuels de donner à chaque bâtiment une identité unique et personnelle. En même temps, les éléments communs concernant les matériaux de la façade et les menuiseries extérieures devaient faire référence à leur histoire parallèle.

Destination mixte

Le bâtiment existant STASSART 36 consistait en une structure constructive constituée de plateaux, de colonnes et de poutres, facilitant le réaménagement d’appartements. L’architecte Slautsky: « Les appartements ont des exigences différentes de celles des bureaux en matière d’isolation thermique et acoustique, d’éclairage naturel, de sécurité en cas d’incendie, etc. C’est la raison pour laquelle nous avons pris une décision importante et radicale. Nous avons démoli toutes les dépendances des étages supérieurs afin de laisser suffisamment d’espace sur le toit du premier étage pour installer des toits verts, des escaliers de sortie et faire passer la lumière du jour. Les surfaces de la façade libérées pouvaient être mieux isolées et finies qualitativement avec des terrasses et une vue sur la verdure. «

Le client avait proposé une destination mixte dans son cahier des charges. Les espaces commerciaux du sous-sol (rez-de-chaussée de l’avenue de la Toison d’Or) ont été conservés. L’architecte Slautsky a conçu de nouveaux espaces de bureaux au premier étage et des unités résidentielles aux étages supérieurs, allant du studio à l’appartement d’une, deux ou trois chambres. Un étage supplémentaire a été construit sur le bâtiment principal côté rue. La façade a été déplacée à 1,5 m de la rue, de sorte qu’aucune perturbation visuelle ne se produise dans la rue qui est assez étroite. Slautsky: « Avec la destination mixte du projet, nous avons répondu à l’emplacement géographique de celui-ci dans un quartier mixte de la capitale. Les différentes activités et fonctions associées présentes à Bruxelles (faire du shopping, travailler, vivre, étudier, se détendre) se reflètent dans le nouveau bâtiment. Les étudiants ou les personnes en quête d’un séjour temporaire le trouveront dans les studios, les petites ou les grandes familles dans les appartements ou les penthouses, les entreprises pourront louer des bureaux au premier étage et les espaces commerciaux et les salles de cinéma de la Toison d’Or resteront disponibles. En plus, de nombreux lieux de détente sont accessibles à pied dans les quartiers et les centres voisins. Nous avons combiné la tranquillité de l’habitat à l’atmosphère animée d’une métropole.”

Synthèse en strates

Les appartements ont été conçus de telle sorte que les zones de couchage et les zones de vie s’alternent côté façade et qu’un tampon soit créé pour la rue au moyen de terrasses couvertes. Les appartements du bloc derrière ont de grandes terrasses réalisées dans une structure en acier. Pour la circulation verticale, les anciens puits d’ascenseur existants ont été réutilisés et dotés d’une nouvelle infrastructure d’ascenseurs. En démolissant et en réduisant les dépendances, en centralisant la circulation verticale dans le cœur sombre du bâtiment en forme de T, en regroupant toutes les salles de bains et les espaces de rangement le long des couloirs, en intégrant des cuisines ouvertes dans les espaces de vie et des (grandes) terrasses, tous les appartements ont pu être équipés de grandes et hautes fenêtres garantissant un maximum de lumière naturelle.

Activité intellectuelle

Les façades du complexe ont été réalisées en plaques Dekton®. Ce n’est pas une pierre, ni un composite, ni une céramique. C’est un matériau de construction totalement nouveau dans lequel le processus de fabrication simule une version accélérée de la formation naturelle de la pierre naturelle. Les matières premières minérales sont pressées avec une pression extrême de 25 000 tonnes. Ces matières premières sont ensuite frittées pour se fondre et devenir un matériau de façade ultra-compact de 8 mm d’épaisseur. L’utilisation de ce matériau s’inscrit parfaitement dans la philosophie générale de Slautky et de son bureau d’architecture: il considère l’architecture comme une activité intellectuelle sur laquelle se fondent la technologie et l’esthétique. Selon lui, le passé, le présent et le futur dans des domaines tels que l’histoire, l’économie, la culture, la géographie et la sociologie doivent être réunis dans ses projets en tant que synthèse construite. Ses études architecturales et ses activités en Argentine, son pays d’origine, ont fortement marqué son patrimoine architectural, à l’instar de l’architecture fonctionnelle de Le Corbusier, d’Alvar Aalto, de Ludwig Mies van der Rohe, de Gerrit Rietveld, de Louis Kahn ou d’Allvaro Siza.Ce creuset de différentes sources d’inspiration constitue la toile sur laquelle il construit son architecture, couche après couche, consciemment ou inconsciemment. L’émotion formelle, la poésie et la sensation sont des éléments essentiels de cette convergence. « Je recherche la simplicité dans différents domaines de mes projets », dit Slautsky, « une simplicité que je voudrais qualifier de complexe. » Soulignons que le complexe STASSART 36 et le complexe STASSART 35 qui sont en cours de construction sont des projets à strates où le contexte urbain, l’utilisation mixte, la structure existante complexe, les attentes en matière de durabilité et de consommation d’énergie et les nouveaux éléments combinés au bâtiment existant forment un mélange où les solutions simples ne sont pas évidentes à formuler. Malgré cette complexité, l’architecte Jorge Slautsky a réussi à réaliser un « design apparemment simple » dans le meilleur sens du terme. Pour lui, l’architecture consiste à faire des synthèses: des synthèses entre l’individuel et le collectif, entre l’émotionnel et le rationnel, entre l’éthique et les intérêts privés ou entre le fonctionnel et l’esthétique. Et dans cette synthèse réside la qualité indéniable de ce projet.

Texte: Johan Geerts
Photos: Stéphanie Kestemont

Atelier d’Architecture Jorge M. Slautsky