Paul Devriendt Architecten

Paul Devriendt Architecten

Une image spatiale qui joue avec votre cerveau

 

Paul Devriendt pense qu’il est encore trop jeune. Trop jeune pour figurer dans ce magazine. Il a encore tant à prouver, dit-il. Et pourtant, le parcours de l’architecte de Asse qui a 36 ans est déjà riche en rebondissements: il a appris le métier chez CAAN Architecten à Gand, créé une entreprise de visualisation 3D, a une préférence pour le cuir – il travaille actuellement sur des « manbags » inspirés du classique sac de la poste – et il sélectionne sur demande de nouvelles collections de pierre naturelle. Et comme si cela ne suffisait pas, il a rapidement développé son propre cabinet d’architectes avec une équipe de onze personnes composée d’ingénieurs, d’architectes paysagistes et de designers d’intérieur. Nous avons discuté avec l’architecte Paul Devriendt de sa démarche et de son dernier projet: la rénovation d’une villa des années 70 dans un parc-jardin impressionnant.

Une oeuvre d’art totale
Ce n’est pas un hasard si Paul Devriendt a déjà une équipe aussi nombreuse. Il y a beaucoup de travail ainsi qu’une demande croissante d’architecture de qualité. « J’ai commencé dans mon garage. Mais à court terme, nous avons remporté environ 60% des concours auxquels nous avons participé. Par conséquent, on a besoin de gens.” Et ces personnes travaillent toujours sur la totalité du concept. Dans le monde de l’architecture et de l’art, ils appellent ça Gesamtkunstwerk. À Asse, l’architecte Paul Devriendt ne jure que par ce principe. Tout simplement parce que c’est aussi plus efficace au niveau du travail: on peut mieux adapter la coque à l’intérieur. « Si vous savez ce qui arrive, vous pouvez en tenir compte dès le départ. Pour les cuisines par exemple, nous faisons toujours appel à des menuisiers ou des constructeurs de cuisines qui proposent véritablement du travail sur mesure. De cette façon, nous pouvons aller dans toutes les directions et nous n’avons pas à faire de compromis. Chez les grands cuisinistes, vous êtes souvent limité à des tailles standard et l’utilisation de pièces de montage. Je pense que c’est limitatif. »

Le cabinet d’architectes sera bientôt assis à la table de conception pour lui-même. Il a récemment acheté une propriété de l’autre côté de la rue. « Nous travaillons actuellement avec onze personnes au bureau. À court terme je recherche un architecte avec expérience et un architecte stagiaire. Et nous avons donc besoin d’avoir plus d’espace. Avant la pandémie du coronavirus, nous travaillions déjà ici avec un système de rotation. Nous n’avons donc pas eu à trop de mal à nous adapter. Mais c’est quand même plus agréable de travailler tous ensemble, car je trouve intéressante la tension positive qui existe entre ingénieurs-architectes, architectes et décorateurs d’intérieur. »

Mélancolie
Paul Devriendt recherche constamment un certain drame dans ses créations. « Je remarque que je suis assez mélancolique de nature. Et je veux en quelque sorte l’utiliser dans mes projets. Peut-être que je désire ramener l’architecture des grands bâtiments dans mes petits projets ». On reconnaît donc d’abord les conceptions du cabinet d’architectes à des volumes épais et robustes. Il joue avec la profondeur et avec de grandes ouvertures dans les bâtiments. Et c’est précisément ce contraste avec des lignes par ailleurs épurées et élégantes qui rend l’architecture du bureau si intéressante. Les bâtiments sont là. Les lourdes colonnes se fixent littéralement dans le paysage.

Sur le mauvais pied
Quand on sait comment Paul Devriendt aborde les choses, on reconnaît son style presque immédiatement. Cette maison de plain-pied des années 1970 a par exemple demandé une rénovation en profondeur. La maison est située dans un immense parc-jardin, mais n’avait pratiquement aucune vue sur les environs verdoyants. Le bureau d’architecture a en grande partie conservé la zone déjà bâtie, mais a opté pour un aménagement différent. Une nouvelle section à côté de la section existante assure que la piscine n’est pas visible depuis l’allée. La première chose que le cabinet d’architectes a faite a été d’appliquer sa marque de fabrique: placer des structures robustes. À la fois des volumes qui s’étendent de l’intérieur vers l’extérieur et des structures épaisses à l’intérieur – par exemple un mur de placard. En utilisant les mêmes principes et architectures à l’intérieur et à l’extérieur, on brouille aussi les limites de ces mêmes espaces. De cette façon, on obtient une expérience non limitative du temps et de l’espace. Les grandes baies vitrées de chaque pièce permettent un meilleur contact avec le jardin. Ces fenêtres ont la même taille partout. La variante réside dans l’application: certaines fenêtres vous piègent, d’autres doivent s’ouvrir. Cette nuance garantit que le design n’est jamais ennuyeux, mais dans l’ensemble, il rayonne de tranquillité.

Plus d’espace visuellement
Paul Devriendt est un fan de l’espace. Mais cela ne signifie pas que l’on doit construire un espace ouvert en soi. « J’aime aussi la sécurité. Je crois fermement au principe du feng shui selon lequel l’environnement peut influencer votre bonheur. Dans la chambre par exemple, je veille à ce que l’on ne s’assoie jamais dos à la porte. On est confortablement installé dans le salon, mais on voit toujours qui entre dans la pièce. C’est parce que Paul Devriendt est intelligent sur les lignes de vue et la circulation dans la maison. Depuis le coin salon, on a une vue sur la cuisine, la salle à manger et l’entrée. Cette ouverture donne l’impression que l’espace est plus grand. En même temps, il y a des colonnes sur le chemin – des murs fixes ou des armoires personnalisées. Celles-ci garantissent que l’on doit se promener quelque part pour atteindre la pièce. « En ne prenant pas toujours le chemin le plus court, on peut ressentir de plus grands espaces. Vous les connectez visuellement, mais le but est de les faire disparaître. » L’architecte utilise la même astuce dans le couloir. Toutes les fenêtres ne sont pas sur la même ligne. Ainsi, lorsque l’on marche dans le couloir, on ne sait pas ce qu’il y a derrière ce vide que l’on voit devant soi. Est-ce une porte ou est-ce un espace supplémentaire? « Votre cerveau a un certain modèle d’attente. En ne remplissant pas ce modèle immédiatement, on préserve un design excitant et inattendu. »

Mais aussi: plus de tranquillité
En plus du bonheur, Paul Devriendt souhaite également apporter la paix à ses créations. C’est pourquoi les fenêtres vers l’extérieur sont partout de la même taille, mais la façade est également enduite jusqu’au bord du toit. « Nous utilisons un profil invisible, afin que le plâtre puisse s’étendre jusqu’au sommet. On ne voit pas d’avant-toit ou de profils qui mettent l’accent sur la fin de la corniche et perturbent ainsi l’image globale. » Pour la même raison, Paul Devriendt travaille aussi avec des matériaux naturels: pierre naturelle, bois massif, acier. « Ce sont des matériaux agréables à travailler et donc une partie importante de mes créations. Ils apportent la paix. » Sur demande, l’architecte sélectionne également des collections de pierres naturelles. Et en plus de son bureau d’architecture, il travaille beaucoup le cuir. Il y a quelques années, lui et Filip Cappoen ont conçu un soi-disant frisbee design pour les hipsters. Entièrement en cuir. Le design a remporté le deuxième prix au concours de cuir BKRK à Bokrijk. « Après tout, l’architecture et la conception de produits consistent à faire correspondre l’émotion, les proportions et la fonction », explique Paul Devriendt.

Une caractéristique frappante de la villa est le toit qui s’incline vers le haut des deux côtés.
On doute seulement que les points les plus élevés du toit soient sur la même ligne. Et si le point où ils se rencontrent est exactement au milieu de la maison. Cette symétrie et cette asymétrie ajoutent du dynamisme et du drame. Tout comme la ligne sous le volume du toit. « On n’obtient pas un seul gros volume, mais différents volumes les uns sur les autres. Tout comme quand on construit quelque chose avec des blocs Lego, nous donnons aussi l’illusion qu’il y a des blocs les uns sur les autres. Les lourdes colonnes et les grandes ouvertures ne font que renforcer cette idée. »

Bien réfléchis et pendant longtemps
Paul Devriendt recherche la tranquillité dans sa démarche. « Plus on pense à chaque détail à l’avance, mieux c’est. Ensuite, on n’a plus qu’à suivre votre plan. Il n’y a plus de discussions. Ensuite, tout va plus vite. Mais surtout: on peut alors se tenir à son concept. Si vous devez encore prendre des décisions sur place ou réfléchir à certains détails, il en resulte plus de stress. Un changement a souvent des conséquences indirectes qui ne deviennent apparentes qu’à un stade ultérieur du projet de construction. Il faut respecter le plan! »

Cette maison a aussi été bien pensée. L’accès au local à vélos est caché dans la façade avant. Le garage a fait place à une chambre supplémentaire. « Aujourd’hui, les gens mettent plus souvent la voiture dehors. Ils ne veulent plus sacrifier de l’espace supplémentaire pour leur voiture. » En faisant ces choix très consciemment, on pourrait aussi penser à l’avenir ici. La maison est prête pour la retraite: les espaces de vie et de nuit sont tous au rez-de-chaussée.

Texte: Jurgen Verbiest
Images: Paul Devriendt Architecten

Paul Devriendt Architecten
Kalkoven 21 ı 1730 Asse
t. 02 305 96 44 ı t. 0479 30 51 28
www.pauldevriendt.com