GRAUX & BAEYENS Architecten
Habitat hybride et clin d’œil à Julian Lampens
Une habitation peut-elle être construite de manière suffisamment flexible que pour correspondre à plusieurs types d’habitations ? Assurément ! Avec cette sublime maison en béton, Graux & Baeyens Architects (GBA) prouve que cette volonté peut même déboucher sur une perle architecturale. À l’étage, l’accent est mis sur l’habitat pour toute une vie avec une entité résidentielle pour le client, tandis que le rez-de-chaussée peut être occupé par une famille qui pourra par la suite prendre soin de lui. Il s’agit donc d’une forme d’habitation hybride dans une enveloppe de béton qui rappelle le travail de Juliaan Lampens.
Le beau terrain était planté d’une maison classique. Mais bien que le cabinet d’architectes GBA aime préserver autant que possible l’existant, les maîtres d’ouvrage souhaitaient clairement partir d’une feuille blanche. Ils avaient une prédilection pour le travail de Juliaan Lampens et voulaient donc absolument une habitation en béton. En fait, il s’agissait même de construire deux habitations en une. Basile Graux : « Le client préfère vivre à l’étage et souhaite pouvoir le faire pour le reste de sa vie. Nous avons donc largement misé sur l’accessibilité en fauteuil roulant et prévu de larges couloirs, une salle de bains accessible aux PMR et la présence d’un ascenseur. L’idée de ce concept est qu’une famille peut venir vivre au rez-de-chaussée et assurer partiellement une prise en charge des maîtres d’ouvrage durant leurs vieux jours en allant faire les courses et en se rendant à la pharmacie pour eux, par exemple. Bien entendu, cette famille peut également faire usage du jardin et l’entretenir. Le programme était peu ordinaire, donc. Grands admirateurs du travail de Juliaan Lampens, les maîtres d’ouvrage avaient remarqué une de nos maisons en béton (la maison N-DP à Malines), qui avait attiré leur attention. Ces deux facteurs, associés à la recherche de la meilleure orientation dans l’environnement, représentaient un défi intéressant. »
Le paysage dans lequel se situe la parcelle a fait le jeu de GBA. Au pied des Ardennes flamandes, de belles vues s’offrent en effet au regard. Koen Baeyens : « Nous avons donc commencé la conception au départ de l’expérience vécue à l’intérieur de l’habitation. À l’étage, de grandes fenêtres permettraient aux habitants de profiter de cet environnement : une prairie avec des chevaux et les ondulations familières. Une vision magnifique que l’on souhaitait pouvoir apprécier. D’un autre côté, la vue sur l’église du village est également agréable. Entre les maisons environnantes, l’on perçoit d’autres ondulations du paysage. Le cadrage fragmentaire de ce paysage, combiné à une promenade architecturale intéressante qui offre des vues diagonales, a donc été notre point de départ. C’est ainsi qu’est née la conception particulière du bâtiment avec ces coudes subtils. D’où l’interaction entre le résultat visé à l’intérieur – les vues et l’organigramme – et ce qui est captivant à l’extérieur. C’est ainsi que nous avons façonné notre volume et avons assemblé les pièces du puzzle jusqu’à ce que tout s’emboîte. »
Mais lorsque l’on dote une construction de grandes fenêtres pour maximiser l’interaction avec l’environnement, il faut tenir compte du risque de surchauffe. Compte tenu du PEB, GBA considère qu’il est plus intéressant dans ce cas de travailler avec des auvents plutôt que de devoir prévoir des stores partout. « Cela n’apporte aucune valeur ajoutée à l’architecture et nuit aux vues libres auxquelles on aspire. Nous trouvions également important de prévoir une terrasse spacieuse à l’étage. La conception inhabituelle et le travail avec les auvents créent une zone de tension entre les différents étages. Nous avons planché longtemps sur ces bonnes proportions. L’interaction entre ces sols et auvents, combinée à la conception du bâtiment, donne une perception complètement différente du volume depuis chaque point de vue. On a l’impression de découvrir un bâtiment différent à chaque fois. Le socle a également été un élément essentiel de cette représentation. »
L’implantation du bâtiment sur la parcelle spacieuse tient par ailleurs compte de la densification au fil du temps. C’est pourquoi GBA a déplacé le volume un peu plus vers la gauche. De cette manière, il est possible, si nécessaire, de séparer une belle parcelle de 20 mètres de large sans aucun problème. GBA souhaitait en outre une certaine stratification dans la conception, en tenant compte de la pente du terrain. Le mur du jardin, le portail et l’aménagement paysager environnant avec arbustes, arbres et massifs verts créent un gradient vers l’imposant bâtiment, lui permettant de s’intégrer de mieux en mieux dans le paysage au fil du temps.
La particularité du programme résidait donc dans la nécessité de créer deux entités résidentielles complètes dans le même bâtiment. Au rez-de-chaussée, les habitants peuvent compter sur une surface d’environ 150 m2, tandis qu’au premier étage, les propriétaires vivent confortablement sur environ 220 m2. Outre les espaces de vie, l’entité du rez-de-chaussée comprend également deux chambres à coucher de taille normale et est dédupliquée via deux portes à partir de la zone d’entrée avec l’ascenseur et l’escalier vers l’entité supérieure. L’habitation du bas dispose néanmoins aussi d’une porte d’entrée séparée, afin d’éviter toute interférence en cas de location.
La terrasse spacieuse de l’étage est orientée autour du volume central comportant la cage d’ascenseur, l’arrière-cuisine, la salle à manger, le salon et la cuisine. Dans l’optique d’une éventuelle vente ultérieure, trois chambres sont également prévues dans l’unité résidentielle du premier étage. L’une d’entre elles fait office de bureau, où les propriétaires aiment planifier leurs voyages. Ils aiment partir en mobil-home, pour lequel un abri a été aménagé dans un grand carport, derrière un mur de jardin.
Le matériau qui tient la vedette dans cette habitation est d’emblée évident. L’alternance entre coffrage de planches et coffrage lisse contribue à définir l’image de ce bâtiment en béton et se reflète également dans le mur du jardin. Associé à la menuiserie en bois, on obtient une « toile neutre » qui met pleinement l’environnement en valeur. L’acier est présent dans la construction du carport, de la balustrade de l’étage et du portail d’entrée. La couleur orange rouille de la laque apporte un accent ludique et frais à l’ensemble massif.
La présence du béton est également perceptible à l’intérieur. Des matériaux chauds tels que l’enduit à la chaux, les sols en terrazzo et le chêne sablé viennent compléter le béton.
D’un point de vue constructif, avec tous ces porte-à-faux, ce projet n’était pas des plus simples en matière de stabilité. GBA a donc sollicité l’intervention du bureau d’études Mouton. En termes d’isolation, le principe de « box in a box » a été utilisé. À l’intérieur, une brique à construction rapide a été utilisée afin de renforcer la robustesse et de favoriser l’inertie, ce qui permet une meilleure rétention de la chaleur et du froid.
Cette construction en béton expressive porte sans aucun doute la griffe de GBA : les bonnes proportions dans un design très fonctionnel et pratique qui met tout en perspective. Car alors que l’on perçoit à première vue une énorme maison, il s’agit en fait d’un volume plutôt compact lorsqu’on sait qu’il abrite deux habitations à part entière. « Se voir proposer un programme aussi spécifique et passionnant n’est pas fréquent. C’était donc un bon point de départ. Nous apprécions également la manière dont le projet répond formellement à son contexte. La perception de l’intérieur, à la fois de l’environnement et de l’habitation elle-même, en raison de la conception particulière – ne déçoit jamais et les proportions sont justes. Le bâtiment respire et, en même temps, on s’y sent en sécurité. Le concept de construction est immédiatement clair et nous nous y sommes tenus de manière très cohérente. C’est par conséquent une construction en béton adaptée aux besoins du client, mais aussi une conception que nous assumons pleinement. Ce genre de projets est très gratifiant pour l’architecte. »
GRAUX & BAEYENS Architecten
Sint-Bernadettestraat 89
9000 Gand
t. +32 9 330 34 93