DDS+

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L’équipe du bureau d’architecture DDS+ a répondu à un concours de parking de dissuasion à une des entrées de Bruxelles. Un projet théoriquement peu glamour qui, contre toute attente, aura motivé et satisfait une équipe boostée par la portée globale d’un projet: notre bien-être futur en ville. Retour sur une étonnante aventure. Remporter un concours produit un puissant effet d’émulation
Shariza Goffin, chargée de la conception du projet, et Didier Peremans, partenaire en charge de ce projet, reviennent avec Plan Magazine sur l’aventure du parking en bordure du ring, tout près du Ceria à Anderlecht.  Le bureau DDS+ a répondu à un appel à projet public faisant l’objet d’un concours d’architecture, de construction et de préfinancement (design, build and finance) pour la Région de Bruxelles Capitale. Ce concours s’est fait dans le cadre d’un projet de décongestionnement de Bruxelles. L’ambition était de construire plusieurs parkings de ce type autour de Bruxelles. Un autre devrait se situer du côté de la rue de Stalle.

Dans un premier temps, participer à un concours signifie un supplément travail par rapport à l’activité habituelle d’un bureau d’architecture. Mais la première bonne surprise de cette participation a été la naissance d’un état d’esprit particulier pour toute une équipe motivée par le concours. L’effet d’émulation est magique et quand, après avoir déployé tant d’énergie, le bureau remporte le concours, le bonheur rayonne sur tout le bureau, se souvient Didier Peremans. Pourtant, le travail est exigeant: pour répondre à ce type de concours, il faut mettre une équipe en place avec une entreprise générale, un financier et enfin une équipe de concepteurs c’est-à-dire des architectes, un paysagiste, les bureaux d’étude pour la stabilité, les techniques spéciales… Car bien sûr, l’attribution du concours n’est pas seulement fondée sur le design. Il faut trouver l’équipe qui non seulement dessinera le meilleur projet, mais aussi le plus rentable c’est-à-dire avec l’entrepreneur et le financier remettant le meilleur prix et le meilleur timing.

Le projet se situe à proximité du ring, près d’une station de métro, d’une ligne de bus au niveau de la chaussée de Mons et aussi tout près d’une gare ferroviaire. On est donc là dans un nœud multimodal où le parking de dissuasion doit inviter à abandonner sa voiture aux portes de Bruxelles pour prendre d’autres moyens de transports publics ou le vélo car il y a aussi une grande quantité d’emplacements pour vélos. La contrainte était dès lors d’allier deux échelles: l’échelle piétonne locale au niveau de la chaussée de Mons en contrebas et l’échelle au niveau du ring à grande vitesse. Résultat: le bâtiment devait être conçu pour répondre à ces deux rythmes, l’un rapide et l’autre lent. À l’échelle du ring le bâtiment a été conçu comme un monolithe perçu dans une grande simplicité globale tandis que, au niveau local, le bâtiment est plus détaillé. C’est à ce niveau-là qu’a été apportée la nuance et c’est de là qu’est partie l’idée de travailler sur un socle détaché du reste du corps du bâtiment pour avoir ce premier gabarit et une échelle de piéton. Au-delà de cette première contrainte, il y a celle, inhérente au projet d’un parking de dissuasion: donner envie. Pour cela, il faut donc veiller à ce que le bâtiment soit facile et fluide sans être perçu comme un coup de poing dans la ville. Pour le piéton, il faut impérativement que le bâtiment reste agréable d’où l’importance de ce socle, précise Shariza.

Dessiner un parking qui fonctionne à toutes les échelles nécessite surtout d’être rationnel dans son approche. Or, un certificat d’urbanisme préexistait au projet ce qui définissait déjà tout un contour: des gabarits, un nombre d’étages, un tracé d’accès et une emprise sur le terrain. La créativité venait donc des astuces constructives mises en place et de la bonne gestion des flux de trafic.
« Nous avons été très attentifs à différencier le trafic rapide des voitures entrant dans le parking et celui des piétons et des cyclistes qui rejoignent la station de métro ou le dépôt de vélos. Pour cela on a pris un peu de liberté par rapport au certificat d’urbanisme qui avait déjà un tracé d’accès au bâtiment puisque nous avons inversé ce tracé pour améliorer les flux. Ainsi on ne rentre pas dans le parking au rez-de-chaussée mais à l’étage intermédiaire afin d’avoir une plus grande facilité de circulation intérieure. » Le socle, on l’a voulu très ouvert, presque transparent, comme pour inviter à y entrer. Ce socle reprend tout le parking multimodal: vélos, voitures partagées, emplacements électriques. Ce rez-de-chaussée favorise la mobilité douce. Au-dessus, le bâtiment se présente plus fermé visuellement, parce que ça correspond aux voitures privées. L’idée derrière cette façon de faire est d’envoyer le signal suivant: « on ne veut plus de ces voitures en ville ». Autre liberté prise par rapport au certificat d’urbanisme: le bâtiment a été rendu plus compact de manière à pouvoir libérer de l’espace et de la perméabilité au niveau du sol. Un parking est en effet un assemblage de dalles de béton et il semblait important de pouvoir redonner plus d’espace aux piétons, à la végétation grâce à un bon aménagement des lieux et à la compacité du bâtiment. Cela a permis de créer, avec l’architecte paysager, une zone d’infiltration, dans la partie basse du terrain. Il s’agit d’un petit dévers dans les abords, qui se remplit d’eau en cas de forte pluie et s’assèche ensuite. Ce bassin tampon naturel, sorte de petit étang temporaire, remplace avantageusement un bassin d’orage simplement enterré.

Le projet a nécessité beaucoup de recherche au niveau de la façade puisque, en termes de sécurité incendie, il entre dans la catégorie du parking ouvert. Cela signifie que la perméabilité des façades est capitale. Le choix de la maille a ainsi fortement été guidé par le pourcentage de ventilation à obtenir pour avoir un bâtiment suffisamment ventilé offrant, dans le même temps, une sensation de fermeture, de paroi. C’est là que le bureau a opté pour un dessin qui se percevait à la fois à l’échelle du ring avec des losanges et des diagonales qui se marquent davantage et, au niveau du piéton, le jeu des deux mailles différentes en alternance crée un jeu de lumière accentué par tout un jeu d’éclairage la nuit. De quoi accentuer la visibilité du bâtiment d’autant que la Région change régulièrement la couleur de cet éclairage. Ainsi, si le bâtiment reste simple dans ses formes, les diagonales viennent casser le côté boîte trop rectangulaire du parking et la lumière y est grandement favorisée pour le bien-être des gens. Tout cela définit une architecture reconnaissable qui fait de ce bâtiment un signal lisible.

 

Ce bâtiment à usage intensif demande de la robustesse. Et par ailleurs, DDS+ le voulait pérenne. Dès lors, le bureau d’architecture a sélectionné des matériaux facilement réutilisables et accessibles financièrement puisque le concours portait également, ne l’oublions pas, sur le volet financier du projet. C’est donc l’acier et le béton qui, pour ces raisons techniques et financières, ont été choisis.
La façade est démontable. La structure en béton pourrait aussi être démontée le cas échéant. Certes, le bâtiment, à cause de ses hauteurs sous plafonds limitées, ne permet pas une réaffectation pour une reconversion future. Didier Peremans précise: « dans les limites imposées par le concours – qui du reste n’avait aucune exigence au niveau de l’aspect durable ni de celui d’une réaffectation possible du bâtiment – nous n’avons pas pu faire plus qu’un bâtiment démontable avec des matériaux réutilisables. »

Shariza Goffin et Didier Peremans reconnaissent qu’au départ, un projet de parking semble bien austère. Mais l’enjeu devient intéressant quand on intègre l’idée qu’il participe au bien-être de tous. Car si le bâtiment fonctionne, est agréable, facile, et qu’il désengorge effectivement la ville tout en étant simplificateur de vie pour les piétons, il participe au confort de tous et contribue à dessiner notre futur. Or, les retours et la satisfaction des utilisateurs sont au rendez-vous, ce qui procure de la gratification à toute l’équipe. Une équipe toujours attentive à faire de chaque projet, un projet innovant, capable d’attirer les regards. Et ici, cerise sur le gâteau, la gratification est également venue du dialogue, de la complicité entre les personnes actives sur le chantier en vue de trouver des accords notamment pour entrer dans l’enveloppe budgétaire. Autant de satisfactions qui font dire à Didier et Shariza qu’il n’y a pas de sous-projet.

Texte: Chantal Ernst
Photos: Marie-Noelle Dailly

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