BIVWAK

BIVWAK

Au cœur d’un tout petit village de la commune de Bouillon répondant au joli nom de La Cornette, la croute terrestre se soulève et fait place à une maison de vacances entièrement conçue en fonction de la nature. Y compris de ses menaces d’inondation.

Jouir de la nature et d’une maison iconique!
Un terrain en pente aboutissant sur un petit ruisseau au cœur du tout petit village de La Cornette comptant une dizaine de maisons dans la commune de Bouillon. Voilà le point de départ de cette aventure architecturale forte. Car dans cet écrin de nature, les propriétaires veulent implanter leur maison de vacances qui deviendrait sans doute, à terme, leur maison principale. Et, ils insistent auprès de l’architecte Julien Déom du studio d’architecture Bivwak, ils veulent une maison-concept, une maison singulière, qui sorte du lot. Pas du standard, pas du banal, pas du déjà vu. Et qu’une partie du terrain soit en aléa d’inondation, peu importe, bien sûr! Il faudra faire avec la coupe de niveau qui mentionne un point au-delà duquel la construction sur pilotis s’impose pour prévenir une éventuelle montée des eaux du ruisseau en contrebas. Cette contrainte paysagère et topographique va, on s’en doute, fortement influencer la conception du bâtiment au niveau structurel. Quant au bâti environnant, composé de constructions typiques en pierre avec toitures à deux versants, il ne décourage pas les maitres d’ouvrages dans leur volonté d’habiter une maison iconique! Il y aura donc une prise de risque architecturale. Elle imposera même la présentation d’un avant-projet au fonctionnaire délégué de la Province. Une manière de prendre la température et de constater que l’opportunité d’être en rupture avec le bâti traditionnel existait pour autant que l’intégration paysagère soit irréprochable. De là est née l’idée de miser sur une toiture végétalisée donnant une impression de soulèvement de sol.

L’idée maitresse: une toiture vue comme un soulèvement de la croute terrestre
Avec cette idée centrale, à savoir concevoir la toiture végétalisée de la façade avant comme si la terre s’était soulevée, le studio d’architecture Bivwak mise davantage sur une intégration paysagère qu’architecturale et urbanistique bien que l’on soit en plein cœur du village. Cela étant, le projet reste un plan à deux versants asymétriques de toiture ; les profils, ceux d’une maison traditionnelle même si on s’éloigne de sa forme. On peut dire qu’il s’agit d’une interprétation du « deux versants » avec une toiture végétalisée qui ne manque pas d’atouts au niveau de son intégration paysagère, surtout depuis la route. Ensuite, il s’agit de jouer avec la topographie du terrain en forte pente pour descendre le plus vite possible du niveau de la route au rez-de-jardin.

Une descente en pleine nature
Au rez-de-chaussée il y a peu de choses: un local technique, un carport, un petit espace de rangement, le hall à savoir un espace en mezzanine plongeant sur le séjour et depuis lequel un ascenseur mène trois mètres plus bas sur l’ensemble des pièces de vie et de nuit. Car la maison est coupée en deux: à droite (sous la toiture végétalisée) se trouvent les pièces de vie en double hauteur (soit cinq mètres) et à gauche (sous le carport et local technique) se situent les chambres, la salle de bains et la buanderie. Des pièces dont la hauteur sous plafond est classique: deux mètres quarante. Que les pièces de vie se situent en bas, c’est-à-dire trois mètres plus bas que la route et pas au niveau de la route est bien entendu une volonté. Il s’agissait de jouir au maximum de la nature qui se situe, depuis les pièces de vie, encore un mètre vingt plus bas vu la présence des pilotis. Et ce n’est pas tout. Pour s’inscrire dans l‘envie très marquée des maitres d’ouvrage d’habiter une maison singulière, celle-ci est faite d’espaces généreux, de hauteur et de lumière. C’est ainsi que le séjour implanté au cœur de la vallée, orienté plein sud vers le ruisseau, est entièrement vitré. Quant au jardin sur lequel il donne, il reste en mode pâture et s’offre de belles allures bucoliques de pré fleuri. Pour profiter pleinement de ce lieu et de sa topographie, pour jouir d’une connexion visuelle et sensorielle avec ce gai jardin et avec l’arrière-plan grimpant vers le ciel, des vitres hautes de cinq mètres s’imposaient. Ici, on dénombre plus de surfaces vitrées que de murs. Seul un mur en façade, composé de béton brut, retient les terres et dégage l’espace de la cuisine trois mètres plus bas.

De béton, de bois, de vitres, d’acier et de végétal
Amateur de matériaux simples et bruts, Julien Déom détaille avec nous ceux qui ont été choisis ici: du béton pour le mur de soutènement et du béton lissé partout pour les sols. Du bardage de bois pour habiller quelques parties de la toiture végétalisée et évoquer les teintes de la croute terrestre mais aussi pour faire écho aux constructions ardennaises. Du métal pour la trame structurelle. Une trame si fine qu’une fois les châssis posés contre elle, on a l’impression que ce sont les châssis eux-mêmes qui tiennent la toiture. Du métal encore pour les boites, toutes de couleur noire, qui viennent structurer le plan libre de la maison. L’une d’elles se glisse entre les chambres et contient le dressing et la salle de bains avec la baignoire en porte-à-faux. Un autre cube de métal noir abrite la cuisine et l’arrière-cuisine. Enfin, une dernière boite fait place à un ascenseur posé comme une tour au milieu de l’espace. Leur couleur noire est aussi celle du plafond du carport et elle se prolonge à l’intérieur afin d’offrir une belle continuité visuelle. Petite particularité pour maitriser l’acoustique d’un lieu ou le verre et le métal sont très présents: le plafond peint en noir est aussi micro-perforé. Le métal se retrouve aussi au niveau du garde-corps au fond du carport: constitué d’acier et d’un habillage en métal déployé, il offre la robustesse voulue sous des allures légères qui évitent en tout cas un effet de masse et vient créer un joli contraste avec le bardage de bois. Quant au végétal, il est sur la toiture, bien sûr, mais aussi partout ailleurs puisque cette maison-concept plonge ses deux habitants dans la nature de la vallée. C’est elle qui ponctue l’expérience de vie d’une maison où, sans cloisonnement, on imagine plus difficilement des scénarios du quotidien d’une famille.

Une architecture qui rend heureux!
Si Julien Déom évoque avec nous la difficulté, voire l’injustice, de se retrouver, d’un projet à l’autre, face à des administrations communales très différentes avec pourtant des clients qui demandent souvent la même chose, il nous parle aussi de la satisfaction qu’il a d’entendre ses clients, au fil du temps, parler avec amour de leur maison. Il précise d’ailleurs que dès le premier rendez-vous avec les maitres d’ouvrage, il clarifie une chose essentielle: le studio d’architecture Bivwak ne sera pas un simple prestataire de services, il tient, en fonction des choix posés et du développement de l’architecture, à agir sur le bienêtre des habitants du lieu. Car, nous confie-t-il, avant d’être des architectes qui aiment les belles choses, nous aimons les gens et voulons créer des espaces qui auront une belle influence sur leur vécu. Peu importe les tensions et les stress qui peuvent surgir au fil des trois années de relation dans le cadre de ce type de projet, pourvu qu’au bout du compte l’espace créé soit plus fort que les tensions. C’est cette architecture de qualité qui, pour lui, crée du patrimoine et constitue une architecture durable c’est-à-dire une architecture qui sera regardée et vécue dans vingt ans avec la même énergie que maintenant. C’est ce qu’il essaie de faire, projet après projet: apporter une plus-value au niveau de l’intégration du bâtiment dans son patrimoine, son village, son paysage et, dans le même temps, créer un espace propice au bonheur et au bienêtre. Ici, pas de doute, le pari est réussi!

Texte: Chantal Ernst
Photos: Bivwak

 

BIVWAK architecture studio
rue de la Gare 60B ı 6890 Libin (Villance)
t. 061 50 20 65
info@bivwak.be ı www.bivwak.be